Merhaba Turquie – 214KM

Lundi 3 – Mercredi 19 Octobre

Adieu la Grèce …

Me voilà de nouveau seule avec ma petite reine ! Elle et moi quittons Athènes en ferry. Pour rejoindre la Turquie, il y a plusieurs options. Je choisis d’aller au plus vite car nous sommes déjà début octobre, l’hiver va bientôt s’installer et je n’ai toujours pas atteint mon but. Je prends donc un ferry de nuit jusqu’à l’île de Lesvos, île grecque qui fait face à la Turquie. « Malheureusement » je suis bloquée sur l’île 48 heures, pas de ferry pour Avaylick, en Turquie, avant jeudi matin. Il y a pire me direz-vous que d’être obligée de rester sur une île. Mais pour retrouver la motivation je voulais pédaler en direction d’Istanbul ! A la place, je vais faire un petit tour sur l’île. Elle est trop grande pour la faire en entier à vélo sur deux jours. Je fais donc une petite boucle avant de trouver un petit logement avec vue sur la mer. Pas de camping sur l’île, n’ayant pas le moral, je décide de me chouchouter. Et je suis accueillie par une petite mamie, Ana, qui me bichonne. A peine arrivée, elle m’offre le déjeuner, des Yemistas – poivrons farcis au riz. J’adore ce plat grec. Ayant déjà déjeuné, ça sera mon dîner. Son mari m’offre raisins et marmelade. Je passe un après-midi et une nuit au calme, très reposant. Au matin, je discute avec mon voisin, un australien qui me donne des conseils sur comment voyager tout en mettant de côté. J’essaie de retenir ses conseils mais il m’a un peu perdu quand il a commencé à parler d’investissement en anglais… déjà qu’en français, je n’y comprends pas grand-chose… En attendant, l’heure tourne et Ana me presse. Elle me propose d’aller dormir dans un studio au-dessus du magasin de son fils à Mytilini.

C’est de là, tôt demain matin, que je dois prendre le ferry pour Ayvalick. Comme son fils ferme sa boutique à 14h (comme tous les commerçants d’ailleurs), il faut donc que je me dépêche, j’ai 20km à faire. Ana m’offre encore un repas à emporter, cette fois des calamars farcis ! Trop gentille. Je fonce donc jusqu’à Mytilini où je retrouve son fils qui ne parle pas anglais. Il me montre le studio, parfait. Bon je ne suis pas seule, il y a quelques petites bébêtes par-ci, par-là, ça me fera de la compagnie. Je me délecte du plat d’Ana avant de repartir à pied. Alors que la rue piétonne de Mytilini était hyper animée à mon arrivée, maintenant elle est déserte. Et je me dépêche, le château de Mytilini ferme à 15h30. J’ai donc une petite heure pour visiter cette grande forteresse. Il est immense, 60 hectares, plusieurs strates historiques. Et j’ai le château pour moi toute seule, puis-je me déclarer princesse de Mytilini ?! Ok, j’arrête de rêver et quitte le château, 15h30, l’immense porte en fer forgé se ferme derrière moi. Je profite du dernier coucher de soleil grec ainsi que de délicieuses pâtisseries grecques pour achever mon séjour en Grèce.

…Bonjour la Turquie !

8h le lendemain matin, un petit ferry m’emmène à Ayvalick. Mon vélo va prendre un peu d’eau salée, la mer est agitée, beaucoup de vent ! 1h30 de traversée. Je pose les pieds en Turquie ! Nouveau continent, nouveau pays, nouveaux repères à trouver. Pas de chance, je pensais aller vite à Istanbul mais me voilà à pédaler face à un vent terrible. En plus j’essaie de prendre les petites routes qui finissent en chemin de terre… ça devient vite un calvaire ! Alors je décide de pédaler sur la route principale, beaucoup de camions et de voitures mais heureusement une large bande sur le côté me permettant d’être un peu plus en sécurité. Première mission : trouver un distributeur pour avoir des lire turques. Puis je roule jusqu’à Havran, petite ville à 50km d’Ayvalick. Il commence à se faire tard, je commence à chercher un endroit où dormir. Je demande directement aux locaux. Je discute avec le vigile d’une banque. Je lui montre la route que je veux emprunter pour me rendre à Bandirma, route de montagne. Il me déconseille cette route, faite de terre, il me suggère de prendre la route principale. Plus de kilomètres mais moins de dénivelé. Avant de repartir, il me propose un café, me voilà sur un canapé à l’intérieur de la banque. Puis un banquier parlant mieux anglais vient discuter avec moi. Il me propose une Pogça, une brioche avec du saucisson chaud, très bon. Puis il veut m’offrir un vrai repas ! Je me retrouve à manger seule dans le petit restaurant d’à côté des petites boulettes de viande, des Köftes – j’apprendrai que c’est un plat typique de la Turquie. Pas si seule, je suis rejointe par un autre gars. Il parle très bien anglais, et après 2 minutes de discussion, il me dit qu’il faut que j’aille dans un bain turc. Je suis en short, il a vu mes jambes poilues (oui après 3 mois de voyage, l’épilation n’est pas ma priorité). Il me dit que « je ressemble à un homme mais qu’heureusement j’ai des formes qui permettent de voir que je suis une femme ». Je ne me démonte pas, lui réponds que l’avis des autres (et surtout de lui), je m’en fiche. Mais des remarques comme ça, ça marque. Et cette même personne, un peu collante, me propose de me payer une chambre d’hôtel mais à 20km et pas sur mon chemin. Ne sachant pas où je vais dormir ce soir, j’étais à deux doigts d’accepter. Mais déjà faire 40km aller/retour juste pour dormir, ce n’est pas dans mes habitudes. Et une proposition venant de quelqu’un qui me dit que je ressemble à un mec, je préfère dire non. Donc je repars. La nuit commence à tomber. Je roule sur la route principale, à l’affût d’un endroit où dormir. Je vais devoir trouver un coin le long de la route pour planter ma tente. A moins que… je m’arrête demander dans un restaurant au bord d’une route. Comme beaucoup en Turquie, ils ne parlent pas anglais. Je mime « dormir », ils comprennent et m’envoient à côté vers la station-service. Le pompiste me montre une petite mosquée – mescid – à côté de la station-service. Parfait, au chaud pour la nuit. Puis la serveuse revient me voir et me propose de m’offrir à dîner ! Je n’ai pas bien faim, ayant mangé des boulettes de viande il n’y a pas si longtemps, mais je suis touchée par le geste, je dis oui avec plaisir. Puis elle m’offre le café turc (une première pour moi…), puis me propose finalement d’aller dormir au village avec elle. Il faut s’imaginer que tout ça se dit en silence ! Nous discutons via Google traduction. Voilà comment a commencé ma rencontre avec Cansu, ses parents et son frère. Ils tiennent donc ce restaurant en bord de route, des gens formidables. Et au lieu d’être de passage pour une nuit, je vais y rester plus d’une semaine !

Une semaine de « woofing » on pourrait dire. Après la première nuit passée avec Cansu chez sa grand-mère, finalement je vais dormir les neuf prochaines nuits chez eux. Gênée, je dors sur le canapé dans le salon, Cansu insiste pour dormir par terre à côté de moi. Je découvre la cuisine turque à leur côté, un régal ! Je n’ai jamais autant mangé qu’en Turquie. Ils commencent la journée de la meilleure des façons : petit-déjeuner – Kavalti – très copieux, qui change un peu tous les jours. Du sucré (miel, confiture de mûres, tahin) et du salé (des œufs brouillés ou en omelettes, tomates, olives, fromage) et bien d’autres spécialités, tout est mis au milieu de la table, et on picore tous avec du pain. En Turquie ils mangent beaucoup de pain, vrai concurrent de la France ! Le tout accompagné de thé, évidemment. Thé que j’apprends à servir aux clients ! Avec la barrière de la langue, pas facile d’aider, mais chaque jour j’accomplis de nouvelles tâches. Nermin, la maman, est à la cuisine. Je l’aide un peu, avec la langue des signes on se comprend. Laver les tables, mettre le couvert, couper le pain, le service, en une semaine, j’ai déjà assimilé quelques mots turcs ! Ils passent énormément de temps au restaurant tous les quatre, le peu de temps chez eux c’est pour dormir ! J’ai passé mes journées au restaurant, j’ai accompagné Cansu à ses leçons de conduite à Havran, j’ai rencontré beaucoup de monde et à chaque fois mon histoire a surpris. Une fille seule à vélo se rendant à Istanbul, ce n’est pas commun. Le soir venu, j’ai visité beaucoup de maisons du village ! J’ai adoré les soirées entre filles passées à manger des graines de tournesol – elles ont de l’entrainement, quand elles en ont mangé une dizaine, j’en suis toujours à décortiquer avec les doigts la coquille de ma première graine, elles se moquent ! Ça n’a pas toujours été facile avec la barrière de la langue, il y a quelques moments d’ennuis et surtout de frustration de ne pas pouvoir dire tout ce que je voudrais. Mais j’ai passé de superbes moments et j’ai appris beaucoup à leur côté, sur la Turquie, ses traditions, sa cuisine, sa langue. La culture turque est tellement riche et différente de la France, que ce fut un vrai plaisir de partager cette semaine avec eux. Il est difficile de partir car je suis chez moi ici, comme ils disent. Mais je dois reprendre la route. Avant de partir, ils m’offrent des habits chauds pour survivre à l’hiver, de quoi manger pour dix jours et même de l’argent ! Ils vont m’aider jusqu’au bout car nous mettons le vélo dans la camionnette et Galip, le papa et Cansu, m’emmènent une dizaine de kilomètres plus loin m’évitant la montée. Je les remercie infiniment, mes premiers jours en Turquie ne pouvaient pas mieux commencer !

Après plus d’une semaine sans pédaler, mes jambes ont presque rouillées. Il faut retrouver le plaisir de pédaler. C’est dimanche, il fait gris, il fait froid, il y a encore du vent, et je suis seule. Je prends un « raccourci », chemin de terre, il se met à pleuvoir, « qu’est-ce que je fais là ??? ». Je ressors toute boueuse. Le retour sur mon deux-roues est bien difficile et triste. Les belles chaleurs estivales me manquent ! Le changement des températures a été un peu trop radical. Je n’ai pas eu le temps de m’y préparer. Mais la soirée va redonner de l’éclat à cette journée morose. Au moment de chercher un endroit pour poser ma tente, je vais voir la seule maison qui se trouve dans les environs. Il y a un couple dans leur jardin. J’essaie de placer mes quelques mots de turcs mais surtout à l’aide de Google traduction, je leur demande s’ils savent où je pourrais planter ma tente. Après m’avoir déconseillé le bivouac à cause d’animaux sauvages par ici, ils me demandent où je vais. Bandirma ! Et ça devait être écrit, ils vont aussi à Bandirma ce soir, c’est là où ils habitent. Ici c’est leur maison de campagne. Ils me proposent de venir avec eux. Ni une, ni deux, mon vélo est dans la camionnette. Et naturellement, avant de partir en voiture à Bandirma, ils m’offrent de quoi me requinquer. Au chaud, près du poêle, Güler me prépare des frites et tout plein de victuailles pour un gros « gouter ». Il y a une bonne demi-heure en voiture pour Bandirma. Nous roulons de nuit, et grâce à Google, nous apprenons à nous connaître. Je leur dis que je voudrais prendre le ferry à Bandirma pour rejoindre Istanbul. Et de fil en aiguille, Güler me propose de rester une journée supplémentaire pour visiter avec elle la ville. J’accepte avec plaisir. Après une très bonne soirée chez eux avec leur fille, Sude, ce lundi matin je vais marcher en ville avec Güler. Nous nous promenons sur le bord de mer, il y a beaucoup de vent. Je découvre le marché de Bandirma. Güler me gâte, je découvre encore d’autres spécialités turques, salées et sucrées. A défaut de faire du vélo, je mange.

Istanbul est donc là, je touche presque du doigt mon but ! Il n’est qu’à 2h30 de ferry ! Mais Istanbul se fait désirer. Alors que je devais prendre le ferry le mardi matin, il est annulé à cause du vent. Le ferry de l’après-midi, annulé aussi. Je reste donc une nuit supplémentaire chez Erol et Güler pour prendre le ferry le mercredi matin. Je les remercie infiniment pour leur accueil et embarque sur le ferry ce mercredi matin, je suis plus qu’à quelques heures d’Istanbul….

Vous l’aurez compris, je n’ai pas beaucoup pédalé durant mes dix premiers jours en Turquie… Le vélo a laissé place aux rencontres. En voyageant à vélo, il faut apprendre à n’être que de passage chez les personnes qui nous accueillent. Ce fut agréable de prendre le temps de mieux connaître les personnes que je rencontre. Connaître leur culture, leur quotidien. La famille de Cansu m’a ouvert leur porte avec tellement de gentillesse. Tout comme Erol et Güler, ils m’ont tous prouvé que l’hospitalité turque n’est pas une légende ! Ils m’ont tous invité à revenir, et c’est sûr, je reviendrai les voir et découvrir davantage de la Turquie, mais quand les journées seront plus chaudes !

Mais pour l’heure, à moi Istanbul…

https://www.komoot.fr/collection/1670908/-de-lyon-a-istanbul-and-back-home

4 thoughts on “Merhaba Turquie – 214KM

  1. Hello Mathilde, je n’ai pas raté un épisode de ta formidable aventure ! Bravo à toi et merci pour le partage 😊. Bises
    Marie-Colette

  2. Ben ça y est, j’ai tout lu, si, si, tout 🙂! Quel bonheur d’être aussi chaleureusement accueillie!
    J’attends la suite avec impatience, à bientôt de te lire… Bises, Michel.

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