Rendez-vous en terre connue : la Turquie, 1ère partie – 310km

Vendredi 9 août, il est temps de passer la dernière frontière du voyage : la Turquie ! J’ai un petit stress au moment de présenter mes papiers : je voyage seulement avec ma carte d’identité mais ouf “no problem”. On quitte les routes étroites et défoncées de la Bulgarie pour une superbe route turque bien goudronnée et avec un large bas-côté. On se sent déjà plus en sécurité. Ce soir, nous allons dormir à Kırklareli, notre ville étape. Plus beaucoup de kilomètres, mais de bons coups de cul, encore. Et il fait toujours aussi chaud qu’en Bulgarie. Un camionneur a même pitié de nous et s’arrête en haut d’une montée pour nous donner 2L d’eau fraîche (on n’était pas assez chargés…). Une fois à Kırklareli, nous trouvons une chambre à 35€ dans un hôtel, après 3 nuits de bivouac et de douche à l’eau salé, c’est un luxe très apprécié ! Mais avant de savourer la douche, nous allons à la recherche d’un magasin de vélo pour changer mes plaquettes de frein et ma chaîne. Magasin de vélo OK, plaquettes de frein à ma taille KO. Mais “no problem”, il ajuste mes plaquettes à la meuleuse ! Les turcs trouvent toujours une solution. Et on est super bien reçu dans ce magasin de vélo, on nous offre thé et eau fraîche. Je profite des talents mécaniques de Jean-Luc une dernière fois, pour avoir un vélo (presque) comme neuf. On peut maintenant aller manger un kebab pour notre dernière soirée ensemble. 

Car le lendemain nos chemins se séparent. Jean-Luc rentre en France en passant par la Grèce et l’Italie. Moi je continue ma route en Turquie, il y a encore du chemin pour rejoindre ma famille turque. Et du chemin pas très plat ! Pour aujourd’hui, l’objectif est d’atteindre la mer près de Tekirdağ. 100 bornes. J’ai repéré un camping sur Google. Alors après avoir roulé sur des chemins en gravier, passé des petits villages, quelques villes, fait les montagnes russes sur une 4 voies : la mer de Marmara est là ! Il n’y a plus qu’à redescendre trouver le camping. Ah non… Ce n’est pas un camping… Bon bein tant pis, j’ai plus de 100km dans les jambes, 18h, je n’irai pas plus loin. Un bivouac sur la plage pour cette nuit, ça ira très bien. Ce n’est pas l’idéal, la plage est toute petite et je ne suis pas très loin des habitations. Mais le cadre est parfait pour une baignade/douche/lessive dans la mer et un dîner au coucher de soleil. Je n’avais pas tout à fait la plage pour moi, un couple avec un enfant profitait de la fraîcheur du soir. L’homme vient me voir et me propose rapidement de dormir dans leur jardin ! Voilà comment j’ai rencontré une superbe famille turque. Je les suis, ils habitent à deux pas de la mer. Je vis une 2ème soirée. Sur leur terrasse, on apprend à se connaître grâce à Google traduction. Il y a les (jeunes) grands-parents – ceux qui m’ont invités chez eux – leur fille Senem en vacances ici avec son mari et ses deux petits enfants. Après être allée en ville manger une glace avec Senem et son mari, je suis morte.

Et en plus de m’offrir un canapé pour la nuit, cette belle famille m’offre l’opportunité de rester avec eux. Volontiers, j’ai encore un peu de temps devant moi avant le mariage. D’abord le célèbre Kahvalti, LE petit-déjeuner turc. Bon pour moi c’est davantage un brunch. Car on le mange souvent vers 11h, une fois que tout le monde est levé. En Turquie je vais devoir me décaler… les turcs vivent la nuit et se lèvent tard. Moi je vis le jour et me couche tôt. Je suis à l’opposé. Après le Kahvalti, Nazlihan, la maman, me propose de faire du burek ! Youhou je suis trop contente d’apprendre à cuisiner cette spécialité ! Je prends des notes et des photos. Je note surtout qu’il faut avoir du temps devant soi. Et puis une fois cuit, on peut goûter nos superbes burek !! Aussi bon qu’en boulangerie. Nous profitons de la mer ce soir-là, avant une autre soirée, musicale cette fois grâce à un voisin guitariste. Et comme souvent en Turquie, il est très difficile de partir! Alors je reste une journée de plus. L’occasion de visiter Tekirdag et partager le quotidien de cette superbe famille. Quelques mots turcs me reviennent. Eux m’ont renommée Merve (prononcez Mèrvé) car Mathilde n’est vraiment pas facile à prononcer pour eux. Quant à moi, j’ai bien du mal aussi à retenir et prononcer correctement tous leurs prénoms, on est quitte ! 

Finalement le troisième jour je me motive à partir. Mais pas avant d’avoir partagé un dernier Kahvalti avec eux. La table est pleine : oeuf/salami, patates sautées, fromage/oignon, et les traditionnels petits plats : olives, fromage, miel, tomates, concombre, fruits, confiture. Chacun trempe avec du pain ou sa fourchette dans les plats au milieu de la table. On se régale. Beau moment de partage avant de me préparer. Je ne pars pas les mains vides, ils m’offrent du burek, des fruits et des gâteaux ! De quoi avoir des forces pour avancer aujourd’hui. Ils m’ont tant donnée, je suis gênée de ne rien offrir en retour. Mais quel bonheur de les avoir croisés sur ma route. Après cette pause revigorante il est temps de pédaler. Moi qui préfère pédaler le matin au lieu de l’après-midi, là je me lance pour une soixantaine de kilomètres à midi, au soleil. Et pas tout plat ! Je longe la mer, tout va bien puis après 22km, bim ! 6%, 7%, 10%, 13%….Ce n’est plus une côte, c’est un mur. Et un long mur. À ma vitesse, je peux admirer la superbe vue, m’arrêter dans mon “élan”, prendre des photos. Superbe idée. J’ai des souvenirs et … une chambre à air à plat. Note à moi-même : ne pas sortir de la route, il y a des épines ! En plein cagnard, je dois réparer. Pour une fois, c’est la roue avant, il faut voir le côté positif. Et ça continue à grimper. D’habitude, je préfère aller super lentement plutôt que marcher à côté de mon vélo. Mais là, je capitule. Dégoulinante, je marche un peu. Une voiture en sens inverse a pitié de moi, fait demi-tour et me propose dans un anglais/turc de m’aider. Je ne me fais pas prier, ni une ni deux, mon vélo et moi sommes chargés dans la voiture. En 2 minutes nous sommes en haut. Le chauffeur ne s’arrête plus ! Je dois insister pour qu’il me dépose, ils étaient prêts à m’emmener jusqu’au camping ! Mais moi je voulais savourer la descente et surtout la vue le long de la mer. Grâce à ce coup d’accélérateur, je n’arrive pas trop tard au camping. Premier camping turc, en bord de mer, j’adore. Je peux piquer une tête avant de dîner au coucher de soleil sur la mer de Marmara. 

Et je peux même profiter du lever de soleil à l’aurore, je suis la seule du camping debout. Aujourd’hui, je n’ai pas beaucoup de kilomètres et j’ai toute la journée. Je ne me sens pas sereine pour faire du bivouac, je préfère viser les campings. Sauf qu’il n’y en a pas partout. Alors j’ajuste mes journées en fonction. Ce soir, direction la mer de Thrace (moi non plus je ne connaissais pas son existence…), c’est la partie nord de la mer Egée. Je vais en direction de la péninsule de Gallipoli (je vous parlerai davantage de cette partie géographique marquée par l’Histoire dans le prochain article !). 30km au compteur, tout se passe bien. J’ai quitté la mer de Marmara pour passer quelques collines et aller sur la partie nord de la péninsule, au bord du golfe de Saros. Mais voilà, de nouveau sur un chemin en gravier, mon pneu arrière ne résiste pas. Deux jours, deux crevaisons = moral à plat. Heureusement j’ai (encore) une chambre à air de secours. Pas le choix, on démonte tout, toujours en plein soleil (bizarrement ça ne m’arrive jamais vers un coin d’ombre). Bon j’ai bien compris que mon pneu arrière est usé ++, il va falloir le changer. Mais d’ici que je trouve un magasin de vélo, on va faire avec. Je n’arrive pas à remonter mon pneu, je commence à m’agacer. Et on ne peut pas dire qu’il y ait beaucoup de passage (un avantage quand je roule en vélo, mais pas top quand j’ai besoin d’aide). Ouf, une camionnette s’arrête, un homme vient à mon secours et m’aide à remonter mon pneu. Et comme je suis saoulé ++ par les chemins en gravier et qu’il me dit qu’il y a une dizaine de kilomètres encore, j’accepte volontiers de mettre mon vélo dans la benne et qu’il m’avance jusqu’au bitume. Mais avant ça, on s’arrête faire un détour pour checker ses champs d’oliviers. Très sympa, il m’offre même à manger (on est en Turquie ne l’oublions pas!). Je mange donc dans la voiture fromage, olives, miel et pain. On essaie de discuter un peu, il a quelques mots en anglais, heureusement, car moi je n’ai que 3 mots en turc. Non, il n’a jamais été en France, mais oui à Saint-Pétersbourg. “Russia, nice, women good, sex easy” : voilà, en seulement quelques mots il a réussi à me dégoûter et me mettre mal à l’aise. Je ne souris plus, je ne parle plus, j’ai qu’une envie c’est de sortir de cette voiture mais je suis coincée. Surtout que je lui demande de m’arrêter quand nous sommes de nouveau sur du bitume mais lui ne s’arrête plus !! Il insiste pour m’emmener à la grande intersection.Hop je descends, récupère mon vélo et le remercie rapidement. Heureuse d’être seule, encore. La journée de vélo est bientôt finie. Encore une vingtaine de kilomètres, vent dans le dos sur une grande voie, ça va tout seul. Maintenant je descends en bord de mer (ne pas penser à tout ce que je vais devoir remonter demain matin…). Petit détour qui en vaut la peine. Bon j’ai vite compris que le camping, encore une fois, n’existait que sur google. Dans la réalité, c’est un camping gratuit en bout de baie. Le cadre est idyllique mais très, très, très venteux. Je suis à deux doigts de faire du kitesurf avec ma tente.. Heureusement un gars vient à ma rescousse et m’aide à planter ma tente. Il y a déjà d’autres tentes autour de moi, je comprends vite que ce ne sont que des hommes, et moi, au milieu. Il est 15h, je peux profiter de la mer. Une baignade puis réparation de mes 2 chambres à air à l’eau de mer. Un turc me montre même la “douche” locale : un tuyau attaché au robinet des toilettes. Moi à partir du moment où c’est gratuit, je ne fais pas la difficile. Et ce soir, vu le vent qu’il y a, j’abandonne l’idée de faire bouillir de l’eau. Je m’offre des mantis fris – ravioles turques – dans un restaurant en bord de mer. Et vue la matinée qui m’attend le lendemain, je fais bien de profiter de ce moment de repos et de simplicité…

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